Bon ben plutôt que de nous creuser la tête, laissons Iréna HAVLICEK, la créatrice de cette conférence gesticulée, nous en parler :

Welcome 2.0 ou nous avons tous des super-pouvoirs pour sauver l’humanité

 

On les appelle migrants, réfugiés, demandeurs d’asile, déboutés, exilés... des gens comme vous et moi, qui ont juste eu la mauvaise idée d’être né au mauvais endroit, un endroit tellement mal choisi qu’ils ont dû en partir, parce qu’il y avait une guerre, une dictature ou une famine, ou parce que tout simplement, leur vie était invivable. Ce qu’ils ne savaient pas, c’est qu’ici aussi, dans ce beau pays qu’est la France, que l’on dit patrie de Droits de l’Homme, l’administration allait s’occuper à ce que leur vie continue à être invivable.

 

Mais heureusement, il y a aussi des milliers, des dizaines de milliers de gens qui pensent que ce n’est pas comme ça que les choses devraient se passer. Parce qu’ils pensent que ces étrangers étrangers, comme disait Prévert, ce sont tout simplement des êtres humains et que défendre leur dignité, c’est défendre la nôtre, notre dignité, et aussi notre capacité à rester humains. Et donc il y a aujourd’hui, en France et en Europe, des réseaux de résistance. Sur internet, mais surtout dans la vraie vie.

Alors l’idée de cette conférence gesticulée, c’est de vous expliquer comment ça se passe. Pour les migrants et aussi pour nous. Je dis nous, parce que vous aussi, vous allez découvrir vos super-pouvoirs. Vous allez voir, sauver l’humanité, c’est facile…

Une conférence, oui, mais pourquoi gesticulée ?

Une conférence gesticulée est une sorte d’OVNI, un objet verbal non identifié. Ou plutôt vachement difficile à définir. Le partage d’un savoir entre gens qui ne sont pas experts de ce savoir. Une parole bâtie avec la vie de celui qui parle et une bonne dose d’autodérision. Un outil d’éducation populaire inventé par Franck Lepage et la scop Le Pavé...

Des « conf’ » y en a aujourd’hui près d’une centaine, avec autant de définitions que de gesticulants. Le principe ? La rencontre entre des savoirs froids (ceux qu’on trouve dans les livres...) et des savoirs chauds (ceux de notre expérience, qu’on ne trouve nulle part). A l’arrivée, cela ne donne pas un savoir tiède, mais un orage !

C’est, avant tout, une drôle d’aventure. Car gesticuler, c’est aller au-delà de ce que l’on se croyait autorisé, à dire. A donner de la voix parce qu’on est convaincu de l’urgence à faire ce « petit pas de côté » qui change radicalement notre vision du monde. Parce qu’on a compris que Moulinex ne libère pas la femme, qu’on a appris à se méfier de recettes alléchantes et faciles, mais qu’on sait bien, comme disait Gébé, que « l’utopie ça réduit à la cuisson, c’est pourquoi il en faut énormément au départ ».

 

La gesticulante : Irena Havlicek

Moi quand j’étais petite, à l’école, on nous appelait "les Tchèques barrés sans provisions". Parce qu’on était réfugiés, qu’on venait de Tchécoslovaquie, et que très souvent, on avait faim. Au départ, un carnet de chèques on ne savait pas ce que c’était, mais on a appris vite, parce qu’écrire une somme en toutes lettres, en français c’est compliqué : soixante-dix-huit francs et quatre-vingt-douze centimes... ma mère, même maintenant qu’on est passé à l’euro, elle n’y arrive toujours pas, alors elle était obligée de choper l’un d’entre nous pour remplir la ligne. Depuis, on a été naturalisés. Là aussi, j’ai eu du mal à comprendre, pourquoi on utilise ce mot. Moi, à chaque fois que je dis ça, j’ai une furieuse envie de contrôler s’il n’y a pas un peu de paille qui sort de mes oreilles.

Bon là, j’ai 57 ans. Je parle toujours pas un français soutenu, mais bon, ça a me donne l’avantage de me faire comprendre par tout le monde. Depuis maintenant plusieurs années, j’essaie d’aider les étrangers qui viennent chercher refuge en France. Il y a des voisins qui me prennent pour une folle, et puis d’autres, pour Superman. J’ai un peu de mal à prendre des vacances, mais je ne changerais pas ma vie pour rien au monde. 

 

Pour en savoir plus sur cette drôle de gesticulante : visitez son blog ici